Du Stade Nautique au bassin couvert
Outre ces considérations locales, prévisibles, dès lors qu’un outil longtemps plébiscité voit le jour, d’autres arguments apparaissent en ces années 1960, l’ensemble des villes françaises amorce une réelle politique d’équipement en matière de sport, politique largement encouragée par le gouvernement d’alors. Cet encouragement d’État revêt un caractère particulier par rapport aux précédents, notamment par rapport à l’encouragement formulé par le Front Populaire. Le gouvernement du général de Gaulle a fait de la grandeur de la France l’un de ces leitmotivs, dans cette perspective, le cuisant échec des athlètes français aux Jeux Olympiques de Rome en 1960 apparaît comme une tache sur l’étendard des ambitions du Général pour notre pays.
A partir des années 1960, le budget du sport augmente de 35%, le nombre des stades passe de 10 à 15000 entre 1960 et 1970, les piscines voient leur nombre triplé pour cette même période, il passe à 1500 en 1970. En parallèle à cet élan des équipements, la nécessité du sport éducatif est fortement réaffirmé : l’Éducation Physique et Sportive devient une des épreuves du baccalauréat, en 1969, le secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports déclare que « l’enseignement de la natation à l’école est dès à présent obligatoire ». Un second bassin, couvert cette fois, devient très vite une nécessité.
La construction d’un bassin couvert est une question récurrente depuis les années 1940 ; l’idée même de bâtir un tel édifice est déjà admise dès 1941 : le 18 février de cette même année, le conseil municipal adopte l’idée de construire une piscine d’hiver, un avant-projet conduit par l’architecte Frapart envisage de bâtir un complexe sportif comprenant l’Office des sports et une piscine, la seconde guerre mondiale enterrera ce projet pour 10 ans. En 1950-1951, une nouvelle opportunité se présente, on envisage d’établir une piscine dans l’enceinte de l’hôpital, l’occupant ayant laissé là un bassin et plus encore un appareillage thermique susceptible de pouvoir chauffer l’eau d’une future piscine, l’idée échouera devant le refus du conseil d’administration de l’hôpital en 1953. L’idée demeure, malgré tout, et la question reste largement débattue. Une étude technique et financière est diligentée en 1958, le site est définitivement retenu, les travaux sont envisagés dès 1959. A cet effet, G. Lombard, maire de Brest et Chapel, président de l’Office des Sports vont plaider la cause brestoise auprès de M. Herzog alors Haut Commissaire à la Jeunesse et aux Sports.
La piscine couverte est l’un des 2 grands projets (avec la construction d’un gymnase) portés par la municipalité d’alors. Le projet retenu est évalué à 170 millions de francs, il est l’œuvre de Cortellari, architecte à l’origine de nombres de construction d’édifices publics à Brest. Le financement demeure un frein au démarrage rapide des travaux, plusieurs partenaires sont sollicités, le Ministère de l’Éducation et la Marine avec laquelle une convention est passée : contre une participation à la construction à hauteur de 25 millions, le personnel de la Marine pourra jouir d’un droit d’entrée préférentiel et plus encore bénéficiera de la jouissance de la future piscine deux matinées par semaine. Il importe de rappeler que cet appel aux autorités militaires est une constante pour tous les projets d’aménagement sur Brest, l’armée dans son acceptation générale (Marine, Armée de Terre) demeure propriétaire de l’essentiel des terrains du centre-ville, le terrain de l’implantation de la piscine ne fis pas exception à la règle. Le financement assuré, les travaux débutèrent, la première pierre à la future piscine est posée en 1962, les travaux ne commencent réellement qu’à l’été 1963, trois ans plus tard, le premier bassin couvert brestois est mis en service, dans le même temps le bassin de Tréornou est climatisé, les brestois disposent désormais de 2 piscines chauffées, dont une couverte. Rappelons pour l’anecdote que Rennes, par exemple, disposait depuis 1926, d’un bassin d’hiver, la magnifique piscine St Georges. L’ensemble réalisé allie assez heureusement les nécessités propres de la pratique sportive à l’accueil organisé du public : des gradins de 800 places plongent sur 2 bassins, un d’apprentissage et un de 25 mètres. Cette combinaison sport et publique est une des composantes remarquables de la piscine Foch.
Cette réalisation tardive au regard de celles réalisées dans d’autres villes, parfois même plus petites (Laval, Morlaix ou même Bréquigny) est sans doute à l’origine de l’absence de nageurs brestois aux plus hauts niveaux. La piscine Foch sera une première réponse mais force est de constater que dès les années 1970, une fois de plus, cette seule piscine couverte ne peut répondre aux exigences du public brestois : des scolaires, de plus en plus nombreux, des étudiants qui affluent vers un pôle universitaire brestois en constitution, aux exigences des nageurs sportifs, représentés par le CNB et le GMAP (Groupe Manche Atlantique de Plongée).
A l’aube des années 1970, le constat est sans appel, après quelques années d’un fonctionnement préjudiciable à tous : chacun devant partager lignes d’eau et créneaux horaires dans une même piscine, ce qui resta longtemps source de friction entre utilisateurs potentiels, il convient d’engager une nouvelle réflexion sur le devenir de la natation et l’avenir des piscines à Brest. En 1969, après de nombreuses années à la présidence du CNB, après avoir mené plusieurs combats pour la natation et les brestois en général, F. Creignou, quitte la présidence tout en restant au comité du CNB. Il incombe à son successeur de redéfinir un avenir pour la natation et le CNB dans la continuité de l’œuvre accomplie.
Une nouvelle époque semble s’ouvrir, après avoir bataillé pour obtenir à la natation le droit de cité, il convient désormais de lui faire franchir un pas supplémentaire, c’est ainsi que J.-J. Vigouroux est porté à la présidence du club en 1970. Il lui incombe de mener le challenge suivant, maintenir les valeurs fondatrices du club (éducatives, sociales, etc.), le berceau initial (la piscine de Tréornou) qui malgré des travaux de rénovation peine à retrouver un second souffle, et tenter de faire progresser la natation sportive vers de plus hauts niveaux.